X, Musk et la dermatose nodulaire : l’Europe face à sa dépendance numérique

X, Musk et la dermatose nodulaire : l’Europe face à sa dépendance numérique

Sur X, la controverse liée aux mesures sanitaires contre la dermatose nodulaire contagieuse (DNC) a été largement portée par des réseaux éloignés des agriculteurs eux-mêmes, selon une étude d’Agoratlas réalisée avec Visibrain. Les analystes ont examiné près de 490 000 tweets et retweets publiés par 61 000 comptes entre le 14 et le 16 décembre, à partir de mots-clés comme « agriculteur », « agriculture », « vache » ou « dermatose ».

La cartographie fait apparaître un espace de discussion dominé par des communautés déjà actives sur des thématiques antivaccins et hostiles à l’Union européenne. Les comptes soutenant Reconquête! y occupent une position centrale et interagissent fortement avec le reste de l’écosystème pour pousser leurs cadrages. Dans ce corpus, les critiques contre le gouvernement structurent une part importante des échanges, avec des attaques visant aussi des comptes institutionnels. L’étude signale également la diffusion de messages copiés-collés, interprétée comme un indice d’actions coordonnées. Parmi les liens les plus partagés figurent notamment une pétition appelant à la destitution d’Emmanuel Macron, ainsi que des contenus ciblant l’accord Mercosur, dont un site de mobilisation dont les mentions légales renvoient à Reconquête!.

Les comptes identifiés comme appartenant à des exploitants agricoles, à l’inverse, restent périphériques dans ces conversations. Ils se situent surtout dans une sphère mêlant médias et responsables politiques, avec peu de passerelles vers les communautés complotistes ou pro-Reconquête!. Les rares points de coprésence repérés concernent des syndicats comme la Coordination rurale et la Confédération paysanne. Les auteurs indiquent enfin ne pas avoir détecté d’ingérence étrangère d’ampleur et relèvent une faible présence de la gauche sur ce thème.

Ce déséquilibre n’a rien d’étonnant. Depuis le rachat de X par Elon Musk, la plateforme fonctionne à dessein comme un accélérateur de récits complotistes et de contenus d’extrême droite, jusque dans les débats publics européen et français. Dans ce contexte, voir un sujet sanitaire agricole capté par des communautés antivax, anti-UE et proches de l’extrême droite s’inscrit dans une mécanique désormais bien rodée.

Tant que l’Europe laissera un acteur privé américain s’étant donné pour mission de faire tomber nos démocraties structurer à ce point le débat public, elle restera exposée aux campagnes trumpistes et aux opérations pro-Kremlin qui prospèrent sur les mêmes ressorts, de la défiance envers les institutions à la désinformation. Pour protéger notre démocratie contre les attaques perpétuelles de l’extrême droite et des puissances étrangères tyranniques, il est plus que temps de sévir comme il se doit, non seulement contre X mais aussi contre le chinois TikTok et ses algorithmes biaisés, et d’accélérer enfin la souveraineté numérique, afin de réduire la dépendance aux GAFAM et de mieux protéger le débat démocratique dans les États membres.

Auteur-ice

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